Dans quelques mois [décembre 2017] dans le bâtiment qui abritait dernièrement le logement du garde-forestier seront disponibles deux logements aménagés par notre commune. Mais ce bâtiment aura été également la gare du tram.
Cette gare ne dit aujourd’hui plus grand-chose aux habitants. Pourtant durant 25 ans, de 1924 à 1949, que l’on habite Essavilly, Froidefontaine, Mignovillard, Petit-Villard ou Communailles, on empruntait, faute d’autre moyen de transport, la ligne des Chemin de Fer Vicinaux du Jura qui reliait Sirod à Boujailles.
C’est le 7 juillet 1879 que la première mention d’un tramway arrive sur la table du conseil municipal, les élus se déclarant « favorables à l’établissement de ce mode de transport dans le canton de Nozeroy ». 3 ans plus tard le conseil prend connaissance d’une mise à l’étude (restée sans suite) d’une ligne (à voie normale celle-là) entre Champagnole et Les Hôpitaux-Neufs (où se situe la ligne PLM Pontarlier-Vallorbe) via Nozeroy et Mignovillard.
En août 1907, les élus s’engagent en faveur de la ligne CFV reliant Champagnole à notre canton via Sirod. « Ce projet présente le plus grand intérêt pour la commune ». Une subvention de 70 000 francs est votée ainsi que l’abandon des terrains communaux nécessaires à l’établissement de la ligne.
Des travaux perturbés par la Première Guerre
L’utilité publique votée en 1912, les travaux débutent au début de l’année 1914 mais la déclaration de guerre stoppe le chantier durant cette dernière. Le 1er novembre 1924, la ligne est exploitée par des trains à vapeur jusqu’à Mignovillard puis le 1er juillet 1925 jusqu’à son terminus.
Un tram, pas un tacot !
En 1923, la décision avait été prise d’électrifier cette ligne ainsi que celle reliant Sirod à Foncine-le-Haut, ce qui substituait au terme « tacot » donc à vapeur celui de « tramway » à traction électrique, vite réduit à « tram ». Ce dernier est mis en service le 18 mars 1928.
Un tracé controversé
Mais le tracé retenu par le Département du Jura n’aura pas été accepté de bonne grâce par la commune. En effet, suite à l’ouverture de la ligne PLM Frasne–Vallorbe en 1915, la gare de Boujailles a perdu les arrêts des trains express, arrêts synonymes de correspondances pour les voyageurs. Ces arrêts reportés à Frasne ont conduits certaines communes du canton, dont Mignovillard principalement, à souhaiter dans une demande du 3 août 1919 que la ligne aboutisse à Frasne.
Sans réponse positive du Département malgré un engagement financier conséquent, Mignovillard approuve en 1922 le tracé vers Boujailles « sous réserve de la création d’un service d’autobus de Mignovillard à Frasne ». Ce service ne sera jamais mis sur pied.
L’influence d’un élu
A l’époque, le conseiller général du canton est M. Bœuf, marchand de vins à Censeau, vivement intéressé par la desserte de son village pour ses expéditions. Son intervention a certainement fortement influencé les décisions réglant le tracé de la ligne vers Boujailles. Une rencoeur s’est faite parmi les habitants de Mignovillard qui lui auraient déclaré : « Tu resteras au purgatoire tant que la ligne n’ira pas jusqu’à Frasne ! ».
Une fin inexorable
Mais le développement de l’automobile et de l’autocar apportera une concurrence trop forte au tram qui souffre de sa lenteur et de ses pannes à répétition. Le trafic ne cessera de décroître au fil des années. Seule la deuxième guerre mondiale permettra à la ligne de retrouver son affluence en une période de restrictions de circulation.
Le 1er mai 1949 verra la fermeture définitive de l’exploitation de la ligne, le service allant être depuis cette date assuré par les autocars de la nouvelle société RDTJ. Et cette ligne est toujours présente dans la commune, assurée par Jurabus mais avec une seule circulation journalière et une desserte réduite par rapport à celle fournie durant un quart de siècle par le tram.
Bernard Courtois
Extrait du bulletin municipal 2017
Sources :
- Magazine MTVS n°10 de 1979
- « Petits trains à l’assaut du Jura », Editions Cenomane 1991
- Archives, Commune de Mignovillard